Date, Horaire et lieu
10/03/2017, Toute la journée - Centre Saint Charles, Université Paul Valéry
Des mots et des gestes. Le corps et la voix dans l’univers de la révolte (14e-18e siècle) »
Journée d’études organisée par Vincent Challet et Héloïse Hermant (CMMC)
10 mars 2017, Université Paul-Valéry-Montpellier
Le programme est disponible ici
Les bruits comme les corps s’inscrivent dans des rapports de pouvoir qui sont aussi des rapports à l’espace et qui constituent des ressorts d’autant plus puissants que toute société d’Ancien Régime est, pour reprendre le terme en vigueur chez les anthropologues, une société de face-à-face. Tenir ensemble les mots et les gestes des révoltes et des révolutions apparaît donc comme une voie intéressante pour analyser à nouveaux frais l’usage de la parole publique dans des contextes émotionnels paroxystiques où les communautés se mettent en branle pour tenter de ré-agencer les mondes sociaux et d’influencer des rapports sociaux qui sont d’abord de domination, par le biais d’une saturation symbolique et réelle d’un espace public dont l’existence ne s’inscrit parfois encore qu’en pointillés et de façon itérative. Imposer ses mots, imposer ses gestes, les déployer dans un espace d’ordinaire contrôlé par les pouvoirs et remodelé par leurs soins pour mieux déployer leur magnificence, c’est aussi une manière de s’approprier cet espace et d’en inverser la signification.
L’apport des sciences sociales (notamment de la sociologie pragmatique), de l’histoire auditive, de l’histoire des émotions, de l’anthropologie de l’écriture et des conflits permettent d’aborder la question de la voix et du corps dans les révoltes avec un acuité nouvelle. Un tel pli réflexif peut sembler d’autant plus salutaire en ce qui concerne les temps modernes dans leur globalité que, à la différence de la période médiévale et de la séquence révolutionnaire ouverte en 1789, la période de l’Ancien Régime n’a guère occasionné d’études de ce type. Le pari assumé d’unspectre géographique et chronologique large devrait donner l’occasion de faire varier les composantes institutionnelles afin d’explorer des situations diverses fortement contextualisées dans leur singularité.
Il s’agira ainsi d’aborder dans leur complexité l’articulation entre ordres et désordres, les rapports entre oralité et écriture, la différence entre la parole et le cri, la circulation de la violence dans le corps social ou encore l’émergence de communautés émotionnelles et politiques, éphémères ou appelées à se pérenniser. Ce faisant, nous espérons fournir les premiers linéaments d’une histoire comparée des sons, des postures, des bruits et des cris qui, pour être volatiles, n’en sont pas moins structurants et, partant, incontournables pour l’intelligence des phénomènes des révoltes et des révolutions. Car se pencher sur les mots et les gestes, ce n’est pas dépolitiser la révolte, mais c’est au contraire faire du corps du révolté un nouveau lieu du politique.