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Axe 2 – La Méditerranée, l’Europe, le Monde

Axe 2

La Méditerranée, l’Europe, le Monde

Responsables : H. Hermant, S. Marzagalli

  1. Politiques en Méditerranée (J.P. Darnis, J. Martinetti)
  2. Dominations imperials XVIII-XIX (A. Bartolomei, X. Huetz de Lemps, H. Hermant)
  3. Guerre et paix en Méditerranée (S. Marzagalli, B. Meazzi, J.P. Pellegrinetti)

A l’heure où les bouleversements politiques et les drames humanitaires qu’ils engendrent posent de nouveau la Méditerranée au centre des préoccupations internationales, nous nous proposons d’interroger la position de la Méditerranée en Europe et dans le monde à partir de trois chantiers complémentaires. Le premier, davantage attentif à l’époque contemporaine, s’intéresse aux usages politiques de la notion de Méditerranée et aux représentations qu’en font les acteurs pris dans des jeux de pouvoir. Le second interroge la Méditerranée en tant qu’espace de déploiement de projets impériaux, formels et informels, par les puissances hégémoniques mondiales. Le troisième, enfin, s’intéresse aux moments de crise représentés par les guerres et plus largement par les conflits internationaux, pour étudier aussi bien les positionnements des élites que les stratégies élaborées pour assurer la continuité des échanges commerciaux. L’étude des phénomènes dans le temps long, indispensable pour en saisir les principales articulations, s’accompagne systématiquement d’un contrepoint sur des séquences plus brèves, ou sur des périodes considérées jusque-là comme purement interstitielles. C’est donc à l’enseigne d’une histoire politique au sens large, irriguée par les apports de l’histoire globale et de l’histoire impériale, sensible aux approches multidisciplinaires propres à la composition du CMMC, et ouverte à des collaborations transdisciplinaires au sein de la MSHS du Sud-Est comme avec des partenaires en France et à l’étranger, que nous concevons cet axe de recherche.

La problématique de l’axe s’articule autour de trois chantiers structurants :

  1. Enjeux politiques en Méditerranée

Responsables : Jean-Pierre Darnis, MCF HDR de civilisation italienne, Joseph Martinetti, MCF de géographie

Ligne majeure de discontinuité socio-économique[1], la Méditerranée est plus globalement une ligne de fracture géopolitique[2]. De part et d’autre de ses rives jouent à nouveau des lignes de faille civilisationnelles exhumées de la longue durée historique par la fin du communisme. Quelles nouvelles représentations animent dès lors les multiples acteurs qui y développent leurs stratégies territoriales ? Si une grille de lecture idéaliste des événements méditerranéens s’est longtemps imposée, elle semble dorénavant fort malmenée par l’accentuation des crises protéiformes qui place la Méditerranée au cœur d’un vaste arc de crises et d’instabilités.

Longtemps considéré comme l’épicentre du Vieux Monde, le bassin méditerranéen n’est certes plus un pôle majeur de puissance. En conséquence, sa périphéricité agit comme une donnée identitaire majeure. Les acteurs spatiaux majeurs qui s’y déploient lui sont extérieurs, tandis que les puissances proprement méditerranéennes sont confinées à une influence strictement régionale. La périphéricité s’exprime dans la fonction de transit qu’exerce la mer intérieure, depuis l’ouverture du canal de Suez en 1869, permettant aux Britanniques de consolider alors la primauté de leur réseau maritime. Elle se poursuit aujourd’hui avec les flux conséquents qui relient par Suez et Gibraltar les façades maritimes d’Asie orientale, d’Europe et d’Amérique. « Penser la Méditerranée » en Europe s’est traduit par une approche résolument optimiste, partant du postulat que ces espaces avaient vocation à s’intégrer à une dynamique européenne de développement.

Avec l’intégration des péninsules méditerranéennes à l’Union Européenne dans les années 1980, la modernisation agricole et industrielle, les infrastructures de transport rénovées ont permis d’arrimer l’Europe méditerranéenne à la Mégalopole européenne. Puis, le processus de Barcelone, suivi du projet d’Union pour la Méditerranée, ont cru pouvoir étendre le périmètre d’intervention européenne au moyen du concept de partenariat de voisinage afin de pacifier par le développement économique les rives Sud et Est de la Méditerranée par le bais d’une intégration économique, sociale, voire sociétale au continent européen et à ses valeurs. La chute du mur de Berlin a provoqué une successive mutation de l’Europe, entre élargissement au Nord et à l’Est et renforcement du poids de l’Allemagne unifiée. Ainsi l’identité « méditerranéenne-européenne » s’est trouvée mécaniquement affaiblie par la nouvelle extension de l’Union, alors qu’il est en même temps chimérique de penser un développement séparé, comme illustré par les déboires de l’Union Pour la Méditerranée.

Le « retour tragique de l’histoire » qu’inaugure le processus trop vite nommé des printemps arabes réoriente alors le regard sur la Méditerranée en l’inscrivant davantage dans un courant de pensée « réaliste » que le géopoliticien américain Robert Kaplan désigne comme la revanche de la géographie[3]. Des questionnements vigoureux resurgissent et contraignent ainsi à repenser le concept de Méditerranée. L’extension du modèle démocratique européen est-elle possible ? Les poussées populistes et nationalistes auxquelles nous assistons en Europe, sur fond de crise migratoire, vont elle aboutir à un ultérieur repli ? La faiblesse de l’idée européenne entraine-t-elle de facto celle d’une idée méditerranéenne ? Les marges méditerranéennes de l’Europe sont désormais aux premières loges de ce théâtre d’instabilité. Elles sont confrontées aux migrations de masse, aux conséquences d’une longue crise économique de leur modèle social fragilisé, à leur perte de compétitivité. La Méditerranée se réactive comme l’espace des transits et des méta-frontières[4]. L’espace méditerranéen favorise certes la conscience d’appartenance à un même écosystème[5] civilisationnel. Il se présente aussi comme une mosaïque de territoires divers, attachés à des identités locales fortement réaffirmées[6].

Fort de sa longue tradition d’études de la Méditerranée – on évoquera entre autres, au lendemain du printemps arabe, le colloque international sur les Mediterranean studies[7]-, le CMMC souhaite poursuivre, dans le cadre du prochain quinquennal, son effort d’analyse. Les approches historiennes, attentives à l’évolution de la référence méditerranéenne et à son utilisation dans le temps s’enrichiront des clés de lecture des géographes, sensibles aux multiplicités de conceptions autour de l’objet « Méditerranée », et des contributions des civilisationnistes, notamment autour des questions d’articulations identitaires en Méditerranée, dans la continuité de la réflexion entamée sur la « Méditerranée italienne »[8]. Il s’agira d’interroger la Méditerranée comme objet politique, c’est-à-dire l’ensemble de projets d’organisations institutionnelles associés à des enjeux de pouvoir. C’est ce caractère performatif de la référence méditerranéenne qui en fait un terrain d’étude privilégié : nous sommes confrontés aujourd’hui à deux paradigmes de la Méditerranée politique, celui d’une opposition Nord/Sud entre « amis » et « ennemis », et celui d’une intégration privilégiée fondée sur la proximité géographique et les liens culturels. Si une partie de nos initiatives se prêtera à un élargissement disciplinaire au sein de la MSHS du Sud-Est, elles répondent également à une demande de la part des collègues de la rive Sud qui souhaitent contribuer à des initiatives visant à penser un objet politique commun, même à partir des postures critiques vis-à-vis des approches européo-centrés.

  1. Dominations impériales XVIIIe –XIXe siècles

Responsables : Arnaud Bartolomei, MCF d’histoire contemporaine, Xavier Huetz de Lemps, PR d’histoire contemporaine et Héloïse Hermant, MCF d’histoire moderne

Depuis une vingtaine d’années, les Imperial studies en constant dialogue avec la connected history et la global history ont ouvert un chantier d’investigation foisonnant. Des questions restent toutefois peu explorées en raison de certains biais interprétatifs comme la séparation académique entre l’étude des relations internationales et des études coloniales ou l’assimilation (parfois subreptice) entre histoire coloniale et histoire impériale, notamment pour l’époque moderne. Il en va ainsi de l’analyse des effets croisés des différentes dynamiques de domination et/ou d’inclusion, aussi bien dans les territoires centraux que dans les territoires dits « périphériques » ou encore des modalités de domination informelle en relation avec des dynamiques impériales. Le projet « dominations impériales » vise à jeter un éclairage sur ces aspects délaissés par l’historiographie. Un premier chantier étudiera l’empire espagnol à l’époque moderne, en particulier dans sa projection méditerranéenne. Les territoires de l’ancienne couronne d’Aragon, véritable « empire dans l’empire », nourriront une étude spécifique qui sera complétée par une analyse de l’entrelacs des types de domination (impériale ou non) exercée par la monarchie catholique sur la péninsule italienne, appréhendé par le prisme des crises. Un second chantier s’attachera à la notion d’empire informel dans les années 1830-1860.

Longtemps prisonnières d’un prisme exclusivement aragonais, les études consacrées au royaume d’Aragon tendent aujourd’hui à se désenclaver d’un questionnement étroit. Il reste que l’Aragon a rarement été envisagé comme observatoire pour analyser les dynamiques de pouvoir et l’architectonique de la monarchie polycentrique espagnole, c’est-à-dire l’assise de sa domination impériale. Et ce d’autant plus que la couronne d’Aragon, avec ses possessions en Méditerranée, fut le lieu d’expérimentation du gouvernement à distance et de l’apprentissage de l’hétérogénéité territoriale et juridictionnelle au Moyen Âge et au début de l’époque moderne. C’est ainsi un véritable empire que Ferdinand d’Aragon apporte à Isabelle de Castille et à une monarchie catholique bientôt planétaire. Dans cette perspective, on propose d’analyser les héritages et les reconfigurations de cet « empire dans l’empire » au socle méditerranéen, en combinant une histoire des idées politiques soucieuse de leur circulation et une histoire sociale forte des apports de l’analyse des réseaux. Une attention particulière sera portée à la constitution et la plasticité d’un « modèle aragonais » de gouvernement soucieux des identités juridiques ainsi qu’aux réflexions sur la place de l’Aragon dans le conglomérat Habsbourg. En parallèle, l’étude des réseaux aragonais dans la monarchie polycentrique permettra d’appréhender les synergies entre les anciens territoires de la couronne d’Aragon et la projection aragonaise dans l’ensemble de l’empire.

Un déplacement spatial (la péninsule italienne dans sa totalité) et un resserrement chronologique (les crises) complèteront cette étude de l’assise de la domination impériale espagnole. En effet, l’analyse des recompositions des élites italiennes au sein de la monarchie espagnole dans les contextes de convulsion politique permettra de tester la cohésion, la flexibilité voire la fragilité des réseaux qui dessinent l’ossature d’un pouvoir multipolaire dans et par-delà les institutions. Les territoires italiens se trouvent alors soumis à un emboîtement de pouvoirs et à des sphères d’influence qui évoluent au cours des siècles (espagnole, française, pontificale) et la capacité des grandes familles italiennes à tisser des liens avec les principales cours européennes pour bénéficier des ressources offertes par celles-ci est déterminante pour expliquer la continuité de leur domination sociale. Les moments de mise à l’épreuve que sont les crises mettront à nu les mécanismes d’inclusion, d’influence et d’ingérence dans la composante italienne de l’empire espagnol mais aussi à ses marges. Cet éventail des possibles rappelle combien l’étude de la domination informelle est essentielle à la compréhension des montages politiques non-clos que sont les empires. Ce dernier thème fait l’objet du deuxième volet du projet « dominations impériales ».

Forgé par les historiens britanniques dans les années 1960, le concept d’ « empire informel » (Informal Empire) désigne les formes d’une domination non formalisée par la conquête territoriale qu’exercèrent les puissances européennes sur le reste du monde entre les années 1830 et les années 1860. Au cours de ces décennies, les gouvernements européens n’hésitent plus à intervenir ouvertement dans les affaires de pouvoirs souverains afin de favoriser les intérêts, en particulier commerciaux, de leurs ressortissants, afin d’obtenir des avantages économiques et politiques, pour promouvoir les politiques locales conformes à leurs intérêts de puissance, alors même qu’ils sont en général contraires aux intérêts véritables du pays dominé. Outre qu’il ne débouche pas sur une abolition de la souveraineté autochtone, ce type nouveau de relations asymétriques serait caractérisé par un dosage variable entre le maniement de la force, les ressources de la diplomatie et le jeu plus ou moins orchestré de forces d’attraction de natures variées.

Si elles se sont intéressées à ces trois décennies, les historiographies anglaise et française en ont cependant généralement livré un récit téléologique, à la lumière de la phase ultérieure de « l’empire formel » : les formes de domination informelle constitueraient un simple prélude à la conquête. Longtemps polarisée sur deux épisodes traumatiques, la perte de l’empire continental américain au début du xixe siècle et la perte des derniers joyaux de la Couronne en 1898, l’historiographie espagnole, elle, a délaissé cette question.

Dans le deuxième volet de ce diptique, il s’agira d’approfondir la connaissance de ce champ historiographique en s’inscrivant dans le renouveau des études impériales tout en les revivifiant par le choix d’une chronologie plus courte (les décennies centrales du siècle), mieux maîtrisée et propice à un comparatisme fécond. Plusieurs axes d’étude seront privilégiés : les institutions mobilisées pour établir, justifier, relayer et diffuser l’influence européenne outre-mer (armée, diplomatie, institutions consulaires, presse, etc.) ; les bénéficiaires européens de cette domination informelle (acteurs économiques mais aussi parfois les missionnaires et autres expatriés) ; le degré d’entendement du phénomène par les contemporains (dominateurs, dominés, rivaux) et les éléments discursifs mobilisés pour justifier ou critiquer ces formes « pseudo-coloniales » de domination, en relation avec les discours coloniaux.

Le projet « Dominations impériales » repose sur quelques jalons posés au long du contrat précédent, il prolonge le volet « contourner, infléchir, subvertir les cadres de la domination » de l’axe « encadrer les sociétés méditerranéennes », qui visait à appréhender en creux les mécanismes de cohésion des systèmes politiques de l’Ancien Régime, notamment pour le cas espagnol. Il s’appuie également sur les acquis des recherches sur les consuls, inscrites dans l’axe « informer et transmettre » et sur ceux du programme Globiber validé par l’ANR dont le CMMC a été partenaire. Ce projet déclinera plusieurs types d’opérations au cours du prochain contrat quinquennal : des séminaires au sein du CMMC, en particulier sur les espaces hispaniques et des rencontres thématiques, éventuellement transpériodiques, qui pourront donner lieu à des publications dans des revues spécialisées. Ce projet pourra aussi s’inscrire au croisement des recherches menées au sein du CMMC et celles auxquelles il est directement associé (axe « Altérités et mondialisation, de la MSHS-SE, séminaires de l’IDA).

  1. Guerres et paix en Méditerranée

Responsables : Barbara Meazzi, PR de littérature et civilisation italienne, Luis Martin, PR en Etudes hispaniques, Jean-Paul Pellegrinetti, PR d’histoire contemporaine et Silvia Marzagalli PR d’histoire moderne

Aire géographique tout autant que culturelle au carrefour de multiples échanges, la Méditerranée est aussi un espace de tensions, crises et guerres. Depuis l’époque moderne, les causes des conflits sont multiples et reposent notamment sur l’expansionnisme de nations avides de conquêtes et sur la maîtrise de ressources aussi bien agricoles que pétrolifères et des routes commerciales pour leur acheminement, mais s’alimentent aussi des différences identitaires et religieuses et des déséquilibres démographiques.

Le projet a pour objectif d’approfondir la manière dont les sociétés méditerranéennes sont confrontées, depuis l’époque moderne, aux différents conflits mondiaux, internationaux ou régionaux et sur les espaces de neutralité qui restent ouverts. La confrontation et la gestion des guerres nous conduiront également à nous interroger sur la question de la paix et la culture du pacifisme qui se sont développés au sein de l’espace méditerranéen.

Une attention particulière sera portée sur l’étude des élites, aussi bien politiques, intellectuelles, artistiques, qu’économiques, durant, pendant ou après les conflits. Nous nous proposons de réfléchir sur leur rôle dans la gestion des répercussions des conflits, mais également dans celui de leur engagement, ou dans celui d’intermédiaires entre l’État et la population. En effet, dans les processus de montée des nationalismes et de modernisation souvent contrainte qui déstabilise les structures socio-économiques traditionnelles aux XIXe et XXe siècles, les nombreux affrontements liés aux processus de colonisation puis de décolonisation, et les « guerres civiles européennes » qui partagent le continent s’accompagnent à des affrontements idéologiques qui présentent ce conflit comme une opposition entre « Civilisation » et « Barbarie », « Progrès » et « Réaction », « révolutionnaires »  et « libéraux », « contre-révolutionnaires » ou « conservateurs », puis « communisme » et « fascisme », « résistants » et « collaborateurs ». Pour creuser le rôle des intellectuels et des élites dans ce processus de lecture du monde, nous ouvrirons aussi un chantier sur les conséquences des conflits dans les modes de créations, aussi bien littéraires qu’artistiques, et leur portée. Les enjeux liés aux reconstructions mémorielles serviront, eux aussi, de base d’analyse.

Parallèlement, nous mènerons une réflexion sur les pratiques de la neutralité dans l’espace méditerranéen, en traçant tout d’abord l’évolution des espaces et marges de manœuvre ouverts aux acteurs neutres dans l’espace méditerranéen. Nous explorerons ensuite la question de la neutralité en Méditerranée sous l’angle de ses effets sur les circulations maritimes. Nous nous intéresserons à la manière par laquelle les puissances neutres s’efforcent de faire respecter leurs droits, en mer comme dans les ports (force navale, systèmes consulaires et ambassades permanentes, création de véritables coalitions formelles entre puissances neutres pour la défense de leurs droits communs, circulation de traités et d’écrits sur cet objet). Cette vision « par le haut » se doit toutefois d’être complétée par une étude attentive aux stratégies des acteurs : navires armés, déguisements et doubles papiers, effacement des traces des itinéraires réels, sont autant de moyens qui permettent de fléchir et négocier concrètement les contours du possible, au-delà des limites du licite imposées par les belligérants. Leur succès, toujours relatif, se mesure au nombre de prises effectuées par les corsaires et la marine des belligérants, mais aussi aux restructurations des courants commerciaux vers des ports plus ouverts, ou moins contrôlés par ceux-ci. A partir de l’appréhension des pratiques de neutralité en Méditerranée sur le temps long, il sera dès lors possible d’envisager sa conceptualisation en tant que composante d’un système de relations politiques internationales et de tester l’hypothèse que l’Europe moderne ait secrété des pratiques de neutralité à géométrie variable pour que, grâce aux neutres, soit assurée la continuation d’une partie des échanges commerciaux nécessaires aux économies des belligérants.

Cette thématique de recherche s’articule au projet de recherche du contrat 2011-2016, mené autour de « L’expérience combattante des Méditerranéens durant la Grande Guerre » qui a souligné l’expérience combattante des poilus méditerranéens dans leur approche de la guerre, de la mort, et des différentes formes de violences. Ce projet a donné lieu à trois publications et a ouvert la voie à de multiples collaborations avec diverses universités, à l’image de la constitution de la base de données des témoignages des combattants mises en place avec le Centre de Recherches Interdisciplinaires en Sciences Humaines et Sociales (CRISES) de l’Université Paul-Valéry de Montpellier III.

Ce projet de recherche repose aussi sur quelques jalons posés au long du contrat précédent, notamment sur l’organisation d’une session au Fourth European Congress on World and Global History of the European Network in Universal and Global History (ENIUGH), « Encounters, Circulations and Conflicts », Paris 4-7 septembre 2016 dont les actes ont donné lieu à une publication en anglais coordonnée par Silvia Marzagalli et Leos Müller, qui recueille deux contributions de chercheurs du CMMC[9]. Par ailleurs, la mobilisation du chantier de recherche sur les consuls, poursuivi depuis quelques années par le CMMC, est lui aussi susceptible d’alimenter ce projet sur la neutralité.

Des articulations interdisciplinaires dans le cadre de la MSHS du Sud-Est – notamment avec une réflexion sur le droit de gens – sont tout-à-fait envisageables. Dans le cadre de l’axe « Histoire des idées, des pratiques et des sciences », il sera également possible d’interroger le concept de neutralité de manière transdisciplinaire, afin de dégager sa place dans différentes disciplines (chimie, physique, psychanalyse, etc.), voire d’entamer une réflexion épistémologique et historique sur la posture neutre du chercheur face à son objet et à sa remise en cause radicale par les approches quantiques.

 

[1] Yves Lacoste, Géopolitique de la Méditerranée, Paris, Armand Colin, 2008.

[2] Bernard Kayser, Méditerranée, une géographie de la fracture, Marseille, Edisud, 1996.

[3] Robert D.Kaplan, la revanche de la géographie, ce que les cartes nous disent des conflits à venir, éditions du Toucan, 2014.

[4] Olivier Clochard, « La Méditerranée dernière frontière avant l’Europe », Cahiers d’Outre-Mer, avril-juin 2003, p 159-180.

[5] Peregrine Horden, Nicholas Purcell, The corrupting sea, a study of Mediterranean history, Blackwell, 2000.

[6] Jean Viard, Daniel Van Euwen, Main basse sur la Provence et la Côte d’Azur, éditions de l’Aube, 2004.

[7] « Recompositions géopolitiques en Méditerranée : un défi pour les Mediterranean Studies », Cahiers de la Méditerranée, 89 (2014), 234 p. La rencontre avait été organisée par Pierre-Yves Beaurepaire, Jean-Pierre Darnis et Joseph Martinetti (Université Nice Sophia Antipolis – CMMC) avec le concours d’Anthony Jones (Northeastern University), chercheur associé au CMMC.

[8] On verra par exemple le colloque international « les racines de la culture fasciste entre latinité et méditerranéité » organisé en novembre 2015 par Barbara Meazzi e Jeremy Guedj (Université Nice Sophia Antipolis-CMMC)

[9] «In apparent disagreement with all law of nations in the world : negotiating neutrality for shipping and trade during the French Revolutionary Wars », forum ed. by Silvia Marzagalli and Leos Müller, International Journal of Maritime History, February 2016, Vol. 28(1), p. 108-192.

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